Je ne sais trop si l’Histoire nous condamne à subir les évènements de manière récurrente, jamais tout à fait les mêmes, rarement à l’identique, mais fondamentalement répétitifs dans leurs causes et leurs conséquences.
Cela dit, cela serait logique, puisque les Hommes sont, depuis toujours, soumis aux mêmes tentations, aux mêmes frustrations, aux mêmes passions tristes ; et force est de constater que leur caractère profond n’a pas évolué d’un iota depuis qu’ils sont sortis de leurs cavernes. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il se trouve toujours des érudits pour étudier les textes datant de plusieurs millénaires avant JC (rien à voir avec Jacques Chirac) : les tréfonds de l’âme humaine défient le temps qui passe, et les vieux écrits sont riches d’enseignements contemporains. Il n’y a que les idéologues progressistes de l’Education nationale pour ne pas comprendre cela, eux qui s’acharnent à détruire les racines gréco-latines de la langue française, sans lesquelles l’arbre de notre (re)connaissance civilisationnelle ne saurait s’élever bien haut !
L’histoire bégaye donc. Plus ou moins et naïf que je suis, je me serais attendu à ce que le président de la République, soit disant féru d’Histoire, ait appris des erreurs de ces illustres prédécesseurs. Il n’en est rien, c’est même tout le contraire : il a multiplié les bourdes et fini de dévaluer à jamais ce qu’il restait de la voix (et de la voie) de la France gaullienne dans le monde. Macron, usurpateur d’un CV trop bien fourni ? Il faut dire que la sulfureuse Mimi Marchand, l’Edgar Hoover en jupons qui fait trembler le tout-Paris avec ses dossiers qui sentent le foutre et la poudre, avait aussi vendu son petit protégé comme « le Mozart de la finance ». C’était au début de 2017. Au réel, les milliards de dettes supplémentaires en disent long sur l’exceptionnel génie du bonhomme ! Subjugués par le roman vendu par les oligarques et leurs affidés des médias de masse lors de la campagne de 2017, les français ont oublié l’enseignement de l’Ecclésiaste : « Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant ». En fait de génie, comme l’a avoué un Alain Minc déçu par sa jeune pousse sur le tard, la vérité c’est que « banquier d’affaires, c’est quand même un métier de pute ». Alors fallait-il attendre autre chose de notre acteur mal inspiré ?
Mais ne soyons pas trop dur avec cet éternel jeune homme – son compteur de maturité s’est probablement arrêté à quatorze ans… Allez savoir pourquoi ! – puisque ce sont les dirigeants occidentaux dans leur ensemble qui ne comprennent rien au sens de l’Histoire Sans doute parce que, même s’ils hantent les couloirs de la politique (politichienne) toute leur vie durant, ils sont appelés à n’exercer les fonctions les plus hautes – présidence de la République en France, Premier ministre au Royaume-Uni, Président des USA, ou Chancelier en Allemagne – que durant un mandat de quatre ou cinq ans, rarement renouvelable plus d’une fois. Rien à voir avec les dirigeants des régimes « moins démocratiques » (même s’il y aurait beaucoup à redire sur le fonctionnement de la démocratie française depuis quelques années !) qui exercent pendant dix ou vingt ans, voire beaucoup plus, c’est-à-dire jusqu’à leur décès, naturel ou non.
La vision d’un leader occidental est de court terme, d’une échéance électorale à l’autre. Celle du dictateur, ou assimilé, porte sur une horizon plus lointain, en même temps qu’elle s’inscrit dans la longue histoire qui l’a précédée.
Puisque le sujet du jour porte sur Vladimir Poutine, et les menaces verbales qu’il fait peser sur les alliés, quasi co-belligérants, de l’Ukraine, examinons, de plus près, le cas de ce « multi-cancéreux » (sic), « atteint de démence » (re-sic), « proche de la mort et désireux d’emmener son peuple et l’Europe avec lui dans la tombe » (re-re-sic) (Pour rappel, ce sont les brillantes analyses des experts de plateau ayant sévi en 2022/23 sur les chaînes du service public et autres antennes privées complaisantes aux idées… autres que la vérité factuelle).
Depuis son accession à la présidence de le Fédération de Russie, Poutine ne cache pas qu’il entend s’inscrire dans les pas, non des camarades Lénine et Brejnev, mais dans ceux de Pierre 1er et de la grande Catherine. Les références culturelles et historiques de l’ex-KGBiste sont celles de la Russie impériale. Le tsar Poutine s’est fixé pour mission de restaurer – et de défendre – le concept d’Empire russe, et, à tout le moins, d’étendre son règne sur toutes les populations russophones d’Europe. Il a pour ennemi direct l’OTAN, qui ne cesse de vouloir grignoter du terrain à l’est de l’Europe et au sud de la Russie ; et son champs d’action est le monde, c’est-à-dire partout où il peut fragiliser les membres de l’OTAN. Il est inutile de sortir de l’école de guerre pour comprendre que les menées du groupe Wagner avait pour double objectif d’assurer à Poutine un accès aux matières premières en Afrique et d’amoindrir drastiquement la présence française sur le continent, histoire de donner une leçon aux deux compères Hollande et Macron.
Poutine n’a jamais fait mystère de ses objectifs ; il les a maintes fois répétés depuis qu’il est au pouvoir. Selon la grille de lecture occidentale, Poutine est basiquement un patriote nationaliste. Le souci, c’est que les dirigeants européens ne sont ni patriotes, ni nationalistes. Autant dire qu’ils ne disposent pas du logiciel pour comprendre la pensée de Poutine. Pas plus qu’ils ne sont en capacité de prendre les convictions de l’homme avec le sérieux qui convient, puisqu’eux-mêmes en sont dépourvus, dès lors qu’il est question d’autre chose que la mondialisation (heureuse) et le libéralisme (vertueux).
Cette impossibilité chronique à « croire » le discours d’un tel adversaire vient du fait que le dirigeant européen n’accorde aucune valeur au verbe. Parce que lui ne parle que pour parler, pour occuper l’espace médiatique, pour faire le buzz. Son unique objectif est, à la base, de se mettre en scène, de se faire valoir car il travaille principalement à défendre sa boutique politicarde et les intérêts de ceux qui l’ont fait. Puisqu’il ne saurait prendre au sérieux ce que lui-même déclare, et puisque, de son point de vue, toute parole politique est démonétisée ab initio, pour ne pas dire qu’elle ne vaut pas un clou, il n’arrive même pas à imaginer que son correspondant au l’autre bout de la ligne du téléphone rouge produise tout autre chose qu’un verbiage dénué de toute suite ou réalité.
Le cas Macron est à ce point caricatural qu’il en est unique. Il a tout raté avec Poutine, parce qu’il préfère s’entendre parler qu’écouter l’Autre. Pourtant, il avait de bonnes cartes à faire valoir face à son homologue, et la France, des intérêts objectifs communs avec la Russie. Il aurait pu être l’homme d’un nouveau partenariat, lui qui avait parlé de la « mort cérébrale de l’OTAN ». Mais il sera dit que l’acteur juvénile casse tous les jouets à portée de sa main. Outre ses revirements incessants et les manquements à sa parole, il a commis deux fautes majeures avec le tsar. La première, une communication « cool », normalement vouée à rester dans le domaine réservé, mais filmée et diffusée sur les réseaux sociaux. Un crime de lèse-majesté. Normal pour un tripoteur des têtes couronnées ! La seconde, ne pas avoir réagi fermement lorsque son prédécesseur a reconnu que les accords de Minsk n’était qu’un torchon de papier, que la France, garante du traité, se foutait royalement du sort des populations russophones du Donbass et que ce n’était qu’un arrangement dilatoire afin de donner le temps à Kiev de s’armer.
Il aurait fait montre de fermeté, en montant au créneau pour restaurer l’image d’une France écornée par le président normal et ainsi désavouer publiquement l’attitude de François Hollande et d’Angela Merckel que l’issue de « l’opération spéciale » russe aurait pu être tout autre. Mais Macron n’est qu’un mauvais acteur qui ne sait que tenir des discours contradictoires d’un jour sur l’autre, en fonction de son public. L’hôte de l’Elysée n’est pas Jupiter, le dieu régnant sur l’Olympe ; il n’est qu’Eole, à peine le régisseur des vents. Le vent de ses paroles vaines ; le vent qu’il prend, comme autant de camouflets, face aux vrais dirigeants du monde.
La triste réalité occidentale nous enseigne – et mon propos globalisant tolère aussi l’exception, mais comme disait Audiard, « il existe aussi des poissons volants mais ils ne constituent pas la majorité du genre » – que les dirigeants européens ne raisonnent plus en termes de « sécurité nationale », « protection du pays », « défense des intérêts vitaux » etc… Ils font partie d’un club supranational qui dilue leurs responsabilités et leurs devoirs face à leurs populations respectives. Ils raisonnent au mieux en marchands, au pire en petits fonctionnaires zélés d’un Machin, quand ils ne jouent pas simplement la partition du petit télégraphiste au profit de Washington, une capitale foncièrement démocrate qui adore jouer à la guerre proxy sur des théâtres très éloignés du territoire américain. Le 11 septembre 2001 a été vécu comme un violent traumatisme – moins de 4.000 morts ; les pertes en Ukraine se comptent par centaines de milliers et Biden n’en a cure, tant qu’il fait tourner son complexe militaro-industriel et peut protéger les fesses de sa progéniture (voir les intérêts du clan Biden en Ukraine et ses relations avec la mafia locale).
Poutine n’est pas un rigolo. Il faut prendre au sérieux tout ce qu’il dit, même si son propos n’est pas exempt d’une approche stratégique et d’une certaine dissimulation tactique. Soyez assuré qu’il fera ce qu’il dit. Un jour ou l’autre, si les circonstances doivent s’y prêter. Il se trouve que le mafia Clinton-Obama-Biden doit rendre les clés du pouvoir début janvier 2025. D’ici-là, en termes de provocation américano-ukrainienne et de réponse russe, tout peut arriver !
PS : ne vous méprenez pas sur mon propos. La Russie est responsable d’une agression condamnable sur le territoire ukrainien. Cependant, les Occidentaux ont sciemment joué avec les nerfs et la patience russe (entre 2015 et 2022) en négligeant la réalité des exactions commises dans le Donbass à l’encontre des populations russophones et en poussant les pions de l’OTAN dans la région. C’est peu de dire que la responsabilité morale et factuelle de ce conflit leur incombe aussi grandement. On ne fait pas sortir l’ours de sa tanière impunément.
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