Je ne compte plus les français qui, sachant que je réside au Japon de manière régulière, me disent leur envie de visiter ce pays. Effet de mode ? Je ne crois pas. Je penche plutôt pour une tendance lourde dont l’origine remonte aux années 1970. C’est à cette époque que Goldorak envoie ses Fulguro-poings et l’Astéro-hache à la face de Donald (pas Trump, mais Duck), de Tom & Jerry et de la famille Barbapapa. La culture nippone s’invite d’abord sur le petit écran, puis sur le grand, avec les films d’animation de Hayao Miyazaki notamment. Dans les années 1980, c’est l’inventivité japonaise qui séduit le grand public, avec le baladeur (plus connu sous l’appellation Walkman), puis le magnétoscope, un temps bloqué à Poitiers par Charles Martel, à moins que ce ne fut à l’initiative d’Edith Cresson. L’automobile suivra avec le succès que l’on sait.
A ce propos, un classement des marques les plus fiables est sorti récemment : dans le top 10 figurent outre les deux marques coréennes et Mini Cooper, pas moins de six marques nippones (Toyota, Lexus, Mazda, Suzuki, Subaru et Mitsubishi). Il est remarquable de constater que ne figure aucun constructeur français, pas plus que Nissan, le seul constructeur japonais manquant, qui se trouve lié à Renault, ce qui se passe de tout commentaire !
La culture nippone revient en force dans les années 2000 avec les manga ! Les anciennes gloires du magazine Pilote (Astérix, Tintin, Lucky Luke…) ont du mal à rivaliser. L’engouement est tel, que des librairies indépendantes se sont spécialisées dans cet univers particulier. Enfin, cerise sur la gâteau, c’est la cuisine nippone qui est louée, considérée pour être à l’Extrême-Orient ce qu’est supposé être le régime crétois : la « healthy food » en bon franglais, en opposition au « fast food » et à la « junk food ».
Entre parenthèses, il faut être allé une fois au Japon, ou dans un vrai restaurant japonais en France (pour ceux qui en ont les moyens financiers) pour comprendre que la nourriture de ce pays ne se limite pas 49er roll (maki sushi), de même que les sushi à la garniture au saumon, comme les sushi shops qui fleurissent partout dans les grandes villes tendraient à vouloir nous le faire croire !
Depuis une paire d’années, l’engouement pour le Japon connait une nouvelle forme : celle-ci a des poils et quatre pattes : le chien japonais. Et sur ce sujet, je n’ai qu’une chose à vous dire : ATTENTION !
On distingue six races vernaculaires originelles, toutes apparentées au Spitz / Chiens primitifs (Groupe 5 de la nomenclature canine). Ils sont reconnaissables à leur queue en faucille – ce qui explique sans doute que les gens en soient devenus marteau ! Ce sont des animaux au port altier, bien proportionnés dont l’apparence plaît, de manière générale. A l’exception du Shiba (le plus petit) et de l’Akita (le plus gros, dont il existe une version croisée avec la race des Bergers allemands – l’American Akita), les autres s’apparentent à une même version de « chien moyen », ayant évoluée de manière spécifique en fonction de la zone géographique où chaque race s’est développée : Hokkaïdo, Kaï, Kishu et Shikoku. Les individus appartenant à ces quatre races se rencontrent de moins en moins souvent au Japon, et nous verrons pourquoi. Il est donc peu probable que vous rencontriez à côté de chez vous ou qu’un éleveur vous en propose. En revanche, il existe en France désormais un offre commerciale visant le Shiba et l’American Akita. Ceux-là ont le vent en poupe, au côté du berger australien et du Border Collie.

On ne le dira jamais assez : il faut se garder de choisir un compagnon à quatre pattes pour sa « beauté », « sa belle allure » ou sa « rareté », voire un « exotisme » qui flatte l’ego. La première chose à prendre en considération devrait être le caractère générique de la race. Quel que soit le chien bien sûr, mais plus encore avec les chiens japonais. Parce que leur allure extérieure, plutôt calme et sympathique, cache un réel tempérament qui doit se piloter comme une voiture de sport.
Leur rapport taille / poids, plutôt raisonnable (sauf l’Akita), pourraient laisser croire que les chiens japonais sont adaptés à la vie en appartement. Cela peut se tenter, mais uniquement à condition que les maîtres disposent de suffisamment de temps libre pour envisager deux à trois sorties par jour. Ces chiens ont grand besoin de se dépenser, à défaut de quoi ils peuvent être turbulents et destructeurs. Quant à la vie en pavillon avec un (grand) jardin, cette solution est naturellement préférable – ce sont des chiens qui peuvent vivre à l’extérieur nuit et jour sans problème – mais elle n’exonère pas les maîtres de sorties et autres promenades.
Pourquoi me direz-vous, si le jardin est vaste et que le chien s’y dépense avec vous ? Parce que les chiens japonais sont très propres. Ils éviteront, autant que faire se peut, de satisfaire des envies très naturelles dans leur périmètre de vie.
Un détail qui a son importance : jusqu’à très récemment, tous les chiens japonais ont été élevés et sélectionnés pour la chasse. Ils ne sont pas fugueur par nature, mais si une odeur sympathique les attire, ils pourront faire des kilomètres pour en suivre la piste. Même avec un excellent dressage ! Avis aux maîtres qui seraient tentés de promener sans laisse ! Je connais ainsi l’exemple d’un Kishu qui n’est revenu chez lui qu’après trois jours passés en forêt à courir le cerf. Côté chasse, l’Akita pourra se mesurer à un ours, les autres sont employés depuis le petit gibier jusqu’aux cervidés. Ces chiens sont rustiques, costauds malgré leur gabarit modeste, endurants et durs au mal. Si les quatre races mentionnées plus haut sont appelées à devenir de plus en plus confidentielles, cela tient au fait qu’il y a moins de chasseurs (et moins d’autorisations délivrées par les préfectures) et donc un besoin moindre de ces chiens de travail. Seul le Shiba (et sa version naine, le Mame Shiba) a été reconverti en animal de compagnie depuis plusieurs décennies.
Un autre point qu’il convient de mentionner : les chiens ne reconnaissent généralement qu’un seul maître dans leur vie. Ce ne sont donc pas des chiens facilement adoptable en refuge. Toutefois, il se peut que le premier « propriétaire » (défaillant ou immature) n’ait justement pas été reconnu comme « le » maître par le chien et que la place reste à prendre !
S’agissant justement du maître, il vaut mieux que celui-ci ait un tempérament de dominant, au risque de se faire bouffer par son chien (au sens figuré, naturellement). Car les chiens japonais sont particulièrement intelligents, et ils testeront régulièrement la constance (et la résistance) du dominant de la meute familiale à laquelle ils se sont intégrés.
Un dernier détail qui peut avoir son importance : ils ne cohabitent pas forcément dans la plus parfaite harmonie avec les autres animaux, plus spécialement les chats.
Alors attention à vous si vous vous laissez séduire par ces peluches fort sympathiques, notamment au moment de Noël : ils sont fidèles et loyaux, mais leur fort tempérament et leur besoin d’être stimulés de manière régulière en font des compagnons particulièrement exigeants.
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